Feel Inspired : Ironwoman La suite

Nous avions laissé Elena à la veille de son Ironman (retrouvez sa préparation dans cet article). Aujourd’hui, notre belle italienne s’attaque à son plus gros challenge à ce jour : l’Ironman de Barcelone.

Elena, la parole est à toi :

Départ matinal vers la zone du départ.

Il faut se placer dans le sas du temps prévu en natation (mieux celui juste au-dessous, conseillent les experts) : je vise 1h10, je me mets dans 1h05.

C’est un rolling start : 2 gars font partir les athlètes toutes les 10 secondes. Moins spectaculaire, mais plus sympa pour les athlètes (surtout les filles).

L’eau est bonne, presque trop chaude avec la combinaison, mais qu’est-ce qu’on flotte bien !

C’est la partie la plus courte d’un IM en temps, mais la plus longue car tu es vraiment tout seul : pas possible d’échanger un mot ou un sourire avec qui ce soit.

Je décide d’utiliser un peu mes jambes (contrairement à d’habitude) en me fiant à mon cardio (même sans appareil, je sais quand je suis au seuil). Comme c’est une ligne droite, je me dis que ce n’est pas la peine de regarder devant trop souvent, mais je n’avais pas oublié que ma nage dévie à gauche (un peu de technique à travailler), je pars donc un peu trop vers le large sur l’aller. Je n’ai toujours pas appris à prendre correctement les pieds des autres nageurs : j’essaie, mais ça me fatigue et m’énerve. Je me dis tant pis : pour garder une trajectoire plus correcte au retour, je fais néanmoins attention à avoir toujours de la mousse à droite et à gauche !

La bouée du dernier virage pour retourner sur la plage est un soulagement : on a fini le petit échauffement, les choses sérieuses commencent !

Dans la tente, je prends mon temps pour enlever ma combinaison, enfiler mes chaussettes et mes chaussures de vélo et surtout manger une barre et boire de l’eau. Je vérifie bien de tout avoir (lunettes, casque, bandana) et je pars chercher mon vélo.

La première partie du parcours est une petite boucle en ville, interdiction de se mettre sur le prolongateur (route pleine de trous et de dos d’âne), puis on attaque le premier tour sur la route qui longe la cote. On va devoir faire 2 tours complets et un tour plus court. Ça commence par un petit faux plat montant, puis descendant et ensuite c’est quasiment tout plat jusqu’au demi tour (km 39).

A la fin du premier tour, à 34 km/h de moyenne, je me demande s’il ne serait pas plus sage de ralentir pour ne pas foirer mon marathon : je réfléchis et j’analyse les paramètres. Je me sens bien, cardio et jambes OK, je n’ai plus qu’une difficulté à faire, la ligne droite (25 km quand même…) face au vent (dans le troisième tour, plus court, l’aller est moins exposée).

Pour une fois, je décide de prendre le risque : stick to the plan, but dare to change it !

Depuis le début, je suis scrupuleusement mon plan de nutrition : une gorgée d’eau ou de boisson énergétique toutes les 15 minutes et quelque chose à manger toutes les 1/2 heure (j’alterne pain d’épice, barre et crackers) : c’est sans doute un des points clés de ma réussite.

Je me dis que sur la partie face au vent, je ne vais pas faire attention la vitesse, mais maintenir mon cardio bas et les jambes faciles pour ne pas me griller (du coup je suis à 29-30 km/h). Le vent souffle un peu plus et ces 25 km sont bien longs. Le deuxième retour vent dans le dos c’est à nouveau du bonheur (36 km/h de moyenne sur cette partie).

Sur le dernier retour, je m’autorise à penser au marathon : ça va être génial de voir les copains un peu plus tranquillement que lors des passages en vélo…

En descendant du vélo, j’arrive à courir : ça me rassure car j’ai un marathon à faire. Je pose mon vélo et je vois qu’il n’y a pas beaucoup de vélos chez les filles (on est toutes regroupées dans une zone dans le parc).

Je passe aux toilettes et me change sans me bousculer, pas la peine de prendre des risques.

A la sortie, j’ai devant moi Alex Zanardi, un mythe pour les italiens : pilote de Formula 1, il a un accident et perd ses 2 jambes. Il dévient alors athlète handbike et gagne les Jeux Paralympiques à Londres et Rio. Il a déjà fait des IM et est là pour faire moins de 9h, tout à la force des bras. Je l’encourage car le marathon n’est pas facile pour lui : on court parfois sur la terre, on passe sur un terrain de foot synthétique où ses roues n’avancent pas et ça se voit qu’il galère. Il terminera en 8h59 : j’ai pu lui parler un peu le lendemain à la remise des prix, un homme très humble et très fort qui incarne l’Anything is possible, devise de l’IM.

Nous devons courir jusqu’à l’arrivée (1,6 km) puis faire 3 boucles. Ça commence donc par la fin, là où il y a le plus de monde : je vois rapidement les copains qui m’encouragent. Ça sera le repère principal de la course. J’avais décidé de courir sans montre, aux sensations, sachant que j’ai beaucoup travaillé mon allure (11 km/h) et que j’ai appris à la reconnaître. Néanmoins, je me fais prendre au piège classique : quand on descend du vélo, on a l’impression de ne pas courir vite, alors qu’on est souvent plus vite que l’allure cible.

La deuxième partie de la boucle est très chiante : il n’y a personne et avant le demi tour, il y a une ligne droite de 2 km qui semble infinie. On passe 2 fois sous le chemin de fer (au 3ème tour, la petite rampe ressemble plutôt au col de la Flégère, à la fin de l’OCC…). Mais il y a les panneaux kilométriques pour les trois boucles, du coup je croise rapidement le panneau km 21 et je me dis « la prochaine fois que je passe par ici, ça sera le semi». Il n’y a pas encore grand monde sur la CAP et ça court vite : je me fais doubler par quelques pros femmes qui sont à leur deuxième tour. Elles volent…

Le plan nutrition, bien testé aussi, prévoit un gel tous les 9 km : je décide de marcher aux ravitos uniquement quand je prends le gel pour boire tranquillement, sinon je prends de l’eau sans m’arrêter. C’est bien de courir aux sensations, mais à la fin du premier tour je demande aux copains mon allure : ils me disent 5’20, ça me rassure et je sais que même en ralentissant un peu je serai sub-4h, mon objectif.

Je découpe la course depuis le début : dans 3 km, je prend mon gel, dans 2 km je vois les copains, au 25ème, « Plus qu’un Paris-Versailles », au 30ème « Plus que 2 Parisiennes » etc…

Sur le deuxième tour, il commence à pleuvoir et ça fait du bien : il y a plus de monde et certains sont moins en forme que d’autres…

Je me permets de penser à la ligne d’arrivée au km 40 tout en me disant que ce n’est plus la peine de l’imaginer car j’y serai bientôt ! Je sens aussi que je pourrais accélérer, mais je me dis que vu le temps en vélo et l’allure du marathon je suis largement en moins de 11h, mon objectif étant 11h30, je décide de profiter des 2 derniers km et surtout des derniers 200m sur le tapis rouge….

Plus de mots pour décrire cette arrivée, je suis aux larmes, comme à l’arrivée de mon premier marathon (avril 2009, ça commence à dater…).

J’attends les autres : c’est magnifique de les voir arriver émus, fatigués, fiers de leur course….

Je ne connaitrai mon classement et mon temps que beaucoup plus tard lorsque je retrouve un téléphone : mon objectif était 11h30 et top 10 de mon age group, je fais 10h39 et 2ème de mon age group. Je suis méga surprise, surtout de la deuxième place.

Le lendemain, les émotions sont aussi très fortes. Un podium devant 500 personnes c’est incroyable et partager cela avec Clarisse est très émouvant.

Ensuite, l’attribution des slots, complètement dingue.

Il y en a 40 qui sont distribués dans les catégories proportionnellement au nombre de partants, mais au moins 1 slot par catégorie. Du coup pour les filles, il y en a un a priori seul par catégorie (on n’est que 10% – 300 sur 3000). Ça commence par les plus âgées (dans les 3 derniers group age il y a une seule finisher et elles prennent toutes leur place) : la première de ma catégorie hésite (elle était à Hawaii l’année dernière), mais le prend : je ne peux pas dire que je suis déçue car je ne m’y attendais pas du tout…

On s’apprête à partir pour visiter Girone lorsque le speaker dit « For the female group 40-44, we might have another slot, we need to check…. » . En effet, une dame dans la catégorie 70-74 est partie, mais n’a pas fini (merci Mrs Kelly !), du coup le slot était attribué aux femmes et passe à la catégorie la plus nombreuse, c’est à dire la mienne (on était 65 alors qu’elles étaient 63 dans les 35-40…). A l’annonce de mon nom, je crie YES : je reçois mon collier hawaïen et j’ai le droit d’aller payer mon inscription (même s’ils font un show, c’est une boite qui veut gagner du fric…).

La morale : je ne vais jamais gagner au loto car j’ai eu la chance d’une vie pendant ce week-end, mais comme dit ma copine « l’argent du loto se dépense, l’IM à Kona se vit… » (mais il faut quand même de l’argent pour y aller !).

Je pensais retrouver une vie normale et refaire un IM en 2019, mais évidemment il faut honorer la chance d’aller à Hawaii (et ne pas trop dénoter), donc ça va encore être une année bien intense. RDV à Kona le 13 octobre 2018 !

To be continued

 

En résumé, les points clés

Pendant la course

  • Alimentation rigoureuse et testée.
  • Se fier aux sensations, mais uniquement si on se connaît bien grâce à l’entrainement.
  • Ne pas innover, même si l’idée semble bonne.
  • Compter dans sa tête quand on est dans le dur : ça fait passer le temps.
  • Les copains : ceux qui courent et qu’on croise avec plaisir et ceux qui prennent leur week end pour nous supporter.
  • Optimiser tout ce que l’on peut prévoir et sur lequel on a la main et accepter ce qu’on ne peut pas changer (météo, conditions…).

 Pendant la prépa

  • Faire autres choses que du tri (swimrun, trail) pour travailler l’endurance.
  • Faire des pauses (pour moi, ce fut une semaine en bateau et une de rando).
  • Ecouter les expériences de course des uns et des autres (c’est pour cela que j’écris !).
  • Prendre une carte de fidélité chez son ostéo.
  • S’entrainer avec des copains qui deviendront des amis (merci à eux, ils se reconnaitront).
  • Faire du gainage.
  • Connaître ses points forts et ses points faibles (respectivement l’endurance et le vélo pour moi) et travailler les deux.
  • Quand les entrainements sont durs, penser à la ligne d’arrivée.
  • La patience et le soutien (même discret) de sa famille.
  • L’émulation.

 



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